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Scènes
Quatre figures fantomatiques errent sur le pont d’un navire négrier bricolé avec des chaises en plastique. Un corps maquillé de noir gît sur un autel. La danseuse et chorégraphe Betty Tchomanga soigne ses images : abstraites, souterraines, de celles qui attrapent les viscères et se glissent sous la peau. Celles-ci sont autant de jalons de sa quête personnelle. Enfant de Charente-Maritime, elle part à dix-huit ans à la recherche de ses racines camerounaises. Ce premier voyage, suivi de nombreux autres, marque le début d’un cycle. Depuis, la chorégraphe – longtemps interprète pour Marlene Monteiro Freitas, Emmanuelle Huynh ou Nina Santes – s’évertue à représenter sur scène l’histoire coloniale qui lie l’Occident à l’Afrique, à travers la figure vaudou de Mami Wata (Mascarades) ou celle du navire-monde (Leçons de Ténèbres). Face à l’époque qui se radicalise, la metteuse en scène abandonne l’ambiguïté des images pour les mots. Avec sa dernière création, une série de portraits intitulée Histoire(s) Décoloniale(s), elle investit les salles de classe, portée par son envie de transmission. Rencontre à Brest, le port industriel dans le dos et l’océan sous les yeux.
Et si la planète nous réglait notre compte une bonne fois pour toutes ? Les Belges de la Compagnie Still Life l’envisagent dans un théâtre à sketchs muets, parodie des incohérences humaines au cœur d’une nature prête à imploser.
Peut-on encore accueillir des mômes dans un monde qui va à vau-l’eau ? Avec les sous-bois brumeux de sa forêt natale en toile de fond, Guillaume Cayet, vieil enfant et jeune papa, lance un trio de comédien·nes sur la piste d’une clairière habitable.
Un Roméo et une Juliette syriens, prisonniers de leurs appartements respectifs en pleine guerre civile. Contre la morosité et l’angoisse, les deux amants échangent des saynètes vidéo tantôt tragiques ou désopilantes. C’est pour raconter leur histoire que le réalisateur franco-marocain Khalil Cherti a basculé dans le théâtre. Rencontre avec ce cinéaste fraîchement débarqué sur les planches.
Dans la Kabbale – une tradition mystique hébraïque –, le Golem est un géant d’argile fabriqué pour protéger les communautés juives. Au début des années 1990, le réalisateur israélien Amos Gitaï disséquait cette créature au cinéma. Trente ans plus tard, il l’invoque sur les planches à travers les textes de trois auteurs juifs – Lamed Shapiro, Joseph Roth et Isaac Bashevis Singer – dans une pièce polyglotte et musicale sur les dangers de l’intolérance.
Musique
Machine à coudre, meubles de récup’, bouteilles en verre : pour Cabosanroque, tout fait l’affaire tant que ça fait du son. Artisans de la musique expé’ depuis les années 2000, le duo catalan a pénétré le monde des arts visuels avec ses installations immersives truffées de symboles forts. Pour le programme « Objets catalans non identifiés » au théâtre Garonne, Laia Torrents Carulla et Roger Aixut Sampietro osent des sculptures « pétrotunées » pour rappeler que les masculinistes sont, aussi, une nuisance sonore.
En 1989, le réalisateur Nanni Moretti se mettait en scène en joueur de waterpolo communiste et amnésique dans Palombella Rossa. Plus de trente-cinq ans plus tard, Mathieu Bauer adapte au plateau cette référence culte du cinéma italien, entre hommage assumé et douce critique socio-politique sur un air de « ça ira mieux demain ».
Il fallait bien cinq heures de théâtre et de démesure pour percer Absalon, Absalon !, célèbre casse-tête littéraire signé William Faulkner. Et Séverine Chavrier est au rendez-vous : au programme, un mastodonte de vidéo, de poussière et de fureur posté aux racines de la famille, noyau du grand capital.
Des ruines de Gaza au Capitole de Washington, la cacophonie du globe gagne toujours plus vite nos écrans. À rebours de l’hyper-information, les deux jeunes artistes Giulia Giammona et Chun Sing Au assument de couper le micro au Maillon, le temps d’entendre l’état du monde.