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Vos travaux se sont nourris de textes tels que ceux de la Catalane Mercè Rodoreda et de Svetlana Alexievitch, Ukraino-biélorusse. Comment passe-t-on des mots aux sons ?

C’est un travail de littérature comparée. Les textes, peu importe leur genre, nous aident à comprendre les sujets sur lesquels nous travaillons. Pour Fleurs et voyages (2022), il s’agissait de montrer l’horreur de la plus belle des manières, de convoquer des images sublimes et dures à la fois. Cette pièce est tirée de l’ouvrage du même nom signé Mercè Rodoreda (2003), des histoires pour enfants écrites dans un style fantastique, insaisissable. L’ouvrage renferme plusieurs images qui nous ont inspiré·es : au milieu du roman, il est question d’un village en forme d’escargot peuplé d’habitants décrits comme « humides, nichés dans la terre et recouverts d’une pluie très fine » – une parabole pour une fosse commune. Dans notre installation finale, on s’est réapproprié·es cette image : celle-ci est devenue un arbre sonore lesté de pierres par des cordes de guitare électrique.



Du son, de l’installation ou du théâtre : quel médium s’impose en premier ?

Notre colonne vertébrale reste le son. Il suffit d’y ajouter un concept et les visuels suivront. Nous sommes proches du « sound art for visual minded » : chaque épisode sonore précède sa visualisation et sa matérialisation. Ce n’est pas juste une bande son qui défile. Notre pratique s’apparente à de l’opéra d’objets.



Au Théâtre Garonne, vous présentez l’installation Petrotuning. Quel est donc le son de la pétro-masculinité ?

En écho aux études de la chercheuse Cara Daggett, nous avons fouillé dans nos propres représentations de la moto et de la voiture. Ce qui nous a d’abord mené·es à relier la pétromasculinité aux débuts de la musique trap, cette branche du hip-hop qui repose sur de l’autotune, des voix masculines et énormément d’egotrip. Nous devons ce rapprochement à une découverte faite pendant nos recherches : l’inventeur de l’autotune, Andy Hildebrand, travaillait comme ingénieur pour les industries pétrolières. Il posait de la dynamite dans la terre pour détecter les zones à forer. Dans ce sillage, nous avons cherché à savoir où se trouvait la faille de la super-masculinité et quel serait le symbole de l’échec des hommes et de leur virilité. Ainsi, dans l’installation, nous figurons leur prostate à travers des réservoirs de moto suspendus dans l’air, l’objet ressemblant à l’organe. Le tout évoque un reliquaire, ce coffre ancien renfermant des objets vénérés, symbole de pouvoir et de foi. Et c’est un peu la même chose avec les réservoirs : dans le gazole se cache la masculinité.



Petrotuning, Cabosanroque



Dans le cadre de "Objets catalans non identifiés", constellation composée avec Cabosanroque au théâtre Garonne, Toulouse :

Flors i viatges (Fleurs et voyages), du 3 au 12 avril
Petrotuning, du 3 au 12 avril
Essai avec Rocío Molina, le 12 avril

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