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Lorsque retentit l’ouverture de Giselle, on s’attend à voir surgir des coulisses la jeune paysanne du fameux ballet romantique éponyme. Mais c’est Tiran Willemse qui fait irruption sur scène, tout de noir vêtu, un t-shirt enfilé à l’envers et un jogging. C’est d’abord son corps, façonné par la danse classique qu’il a étudiée en Afrique du Sud et en Europe, qui s’impose. Prenant le contrepied de la danseuse de ballet que l’on dit « blanc » – caractérisée par son tutu immaculé –, le danseur-chorégraphe étire sa silhouette svelte et musclée dans le silence complet, dos au public. `

 

Ses lignes toutes en grâce, d'abord captivantes, évitent de justesse la monotonie en élargissant le spectre gestuel à d’autres registres. Bras et jambes parallèles ou à angles droits, sauts furtifs, dos cambré et courbé : le corps du danseur se délie à mesure qu’il prend possession de la scène. De même les traits de son visage s’émancipent de la retenue intériorisée du ballet pour glisser vers une expressivité exacerbée – jusqu’à faire gicler des bouteilles d’eau sur son torse. Son regard tantôt halluciné, tantôt rayonnant ou espiègle, décline les états d’euphorie procurés par la danse.

 


Exploration en surface


Hélas, cet élan plein de promesses se dissipe au fil des séquences. Clins d’œil aux ondulations d’Isadora Duncan, emprunts aux gestes du kuduro (danse originaire d’Angola), de l’alanta (du Nigeria) et de La Bayadère de Rudolf Noureev… Au cours de ses apparitions, entrecoupées de fondus au noir, les références se juxtaposent sans jamais fusionner. Pourtant guidé par de vives intuitions, le solo de Tiran Willemse effleure les axes qu’il entend explorer et n’approfondit guère sur l’heure que dure la pièce. En comparaison avec les travaux de consœurs sud-africaines comme Dada Masilo ou Mamela Nyamza qui confrontent classique et contemporain – ainsi que leurs imaginaires et les conventions esthétiques –, le performeur convoque plus de matière chorégraphique que ne peut en contenir son solo. Sa métamorphose corporelle en vient à manquer de finesse et de densité. Malgré l’énergie débordante du performeur qui se met – littéralement – à nu, Untitled (Nostalgia, Act 3) ne touche les mots justes que du bout des doigts.  

 


Untitled (Nostalgia, Act 3) de Tiran Willemse est présenté jusqu’au 16 juillet en partenariat avec la SCH – Sélection suisse en Avignon aux Hivernales – CDCN d’Avignon


⇢ les 11 et 12 octobre, Festival Actoral, Marseille

⇢ du 15 au 17 octobre, La Ménagerie de verre, Paris