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De l’emblématique espace sous toile cirée, il ne reste qu’une piste circulaire et une carcasse de loge offerte aux regards durant tout le spectacle. Éparpillés autour, les accessoires au menu du soir : des cymbales, des piles d’assiettes en porcelaine, des câbles électriques. Remplaçant le trapèze, une grosse boule de céramique est suspendue, légèrement menaçante. Seul en scène, une heure durant, l’artiste s’appliquera à tordre les codes du genre circassien, réduits à l’état de vestiges. Il y a bien des applaudissements, mais grossièrement préenregistrés et dénués de sincérité ; il y a bien des tenues à paillettes, sequins et tissus mordorés, mais portés avec ironie ; même les roulements de tambour mutent sans transition en épique solo de percussions. Et si les numéros s’enchaînent comme le veut la tradition, l’artiste les prend tous à son compte : clown, équilibriste, magicien, dresseur et animal. Les frontières entre rire, émerveillement et poésie n’ont plus raison d’être. 

 

On l’a compris : dans sa version Vogel 2.0, le cirque ne cherche plus à faire illusion. Mais il ne sacrifie pas pour autant la virtuosité. Cette dernière plane comme un vieux fantôme increvable bien que gentiment désuet. On s’en amuse à défaut de pouvoir s’en débarrasser. S’il y a prouesse, c’est avant tout parce qu’il y a bâton dans les roues : tourner en rond avec un vélo aux pédales montées à l’envers, planter sciemment des obstacles à éviter, et à roller si possible. 

 

Et si ce monde bricolé n’était pas si éloigné du nôtre ? N’est-il pas, comme notre réalité, peuplé de ruines dont on ne sait que faire, de valeurs dont on aimerait bien se débarrasser et en proie à des catastrophes courues d’avance ? Pas question pour autant de baisser les bras. Julien Vogel à quelques secrets à nous glisser : ce qui nous détruit va peut-être plus vite que nous, mais le système, comme la grosse boule suspendue, est plus fragile qu’il n’y paraît. 

 

Ceramic Circus de Julian Vogel a été présenté du 2 au 6 octobre aux Subs, Lyon

 ⇢ du 28 février au 1er mars 2025  au Théâtre d'Orléans 

 ⇢ le 24 janvier à l'espace Germinal à Fosses 

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