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Est-il poule ou roi, ce Charles III d’Anjou ? Depuis le jour où il eut la mauvaise idée d’essuyer son séant princier avec un gallinacé qui, pas tout à fait crevé, décida d’y rester accroché, l’indistinction règne à la cour. Dans le bal superficiel de froufrous, petits pas de danse et tasses de thé, on attend l’œuf d’or journalier du Re Chicchinella, mais peut-être aussi sa succession. Le roi est mort, vive la reine ? 

 

À la suite de Pupo di zucchero et La Scortecata, Emma Dante poursuit ses adaptations des contes populaires de Giambattista Basile. La sobriété savante de son écriture scénique navigue entre les registres alliant, comme si cela allait de soi, le grotesque, le potache et le sublime. Plateau vide, l’imaginaire est confié à la langue impertinente de l’auteur sicilien et aux extraordinaires costumes et accessoires. Ces derniers donnent aux corps des allures de statues et leurs poses transforment d’un rien le plateau en tableau. 

 

On rit, beaucoup et de bon cœur, devant l’absurdité de la situation, devant la vacuité bavarde et protocolaire de la vie de château. Où les joutes verbales se transforment en énumération de merveilles culinaires française, les chorégraphies s’exécutent en mangeant des spaghettis, et le goûter se métamorphose en salle d’échos assourdissants. La mélancolie, pourtant, se tient en embuscade et finit par nous rattraper. Ici le roi est nu au propre comme au figuré : le pouvoir n’est qu’une fiction, le monarque peut bien être une poule, tant il se résume à une fonction. Mais le cœur battant de la fable est encore ailleurs : dans la solitude existentielle de celui qui occupe le trône. 

 


Re Chicchinella de Emma Dante a été présenté du 9 au 13 octobre aux Célestins, Lyon


du 7 au 29 janvier à la Colline, Paris

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