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20 pieds, 30 pieds, 40 pieds. Si leur longueur varie, leur présence n’en a pas pour autant moins étonné les passants. On a pu voir, ces derniers temps, de grands caissons métalliques investir l’espace public parisien : les 14-15, 21 et 22 avril derniers à La Villette, dans le cadre du festival Hautes Tensions, et le 29 avril au festival Printemps des rues, dans le Xe arrondissement.

De la catégorie des UTI (unités de transport intermodal), conçus pour le transport de marchandises, ces parallélépipèdes géants n’invitent pas, au premier abord, à la poésie. C’est pourtant dans ce cadre que la compagnie Ktha envisage l’élaboration de ses spectacles depuis 2009. « Cet espace conçu pour les objets devient ici celui où l’homme est confronté à sa propre marchandisation », explique la compagnie. Le container comme symbole de la mondialisation et de la réification des échanges.




Est-ce que le monde sait qu'il me parle ?, compagnie Ktha, captation du spectacle à Confluences (Paris), en mars 2010.


Est-ce que le monde sait qu’il me parle ?
« Ils me disent cher ami, cher client, mes très chers concitoyens
Ils me disent nous
Ils me disent bonne journée à demain merci ne quittez pas
Ils me disent and the winner is
Ils me disent que du bonheur. »
Slogans publicitaires, messages vocaux artificiels, formules politiques et administratives, proverbes populaires, la création Est-ce que le monde sait qu’il me parle ? passe en revue, épluche et décortique l’ensemble des signes, verbalisés ou non, que notre réel produit. Personnifier le monde afin de le disséquer, lui faire incarner un discours comme s’il pouvait en prendre conscience, le projet 2009 de la compagnie Ktha s’attaque ici avec dérision à cet empire des signes qui nous dépasse. Deux interprètes donnent à entendre ce flux omniprésent de mots et de pictogrammes, le répétant jusqu’à l’épuisement. Une centaine de poupées, tombées du ciel, viennent par ailleurs s’écraser contre la tôle du container, alors que les acteurs cherchent difficilement à les ordonner dans l’espace confiné. Si la dénonciation de la société de consommation, de sa saturation et de sa démesure, est évidemment perceptible dans ce spectacle, elle est néanmoins mise en scène avec précaution et tendresse.

Je suis une personne
« Je suis une personne

Et il m’arrive souvent d’oublier que tu en es une
Je voudrais te le dire
Je suis une personne. »
Deux containers superposés, un public divisé, une comédienne se déplaçant avec agilité de l’un à l’autre : le dispositif scénique de la pièce Je suis une personne joue avec les codes traditionnels de la représentation. Le spectacle est construit autour d’une tension : reproduire en partie les conditions de l’emprisonnement tout l’inscrivant dans l’intimité du personnage.  Monologue intérieur parfois indéchiffrable, le texte cherche, comme un leitmotiv, à délivrer les saveurs et les joies enfouies de l’existence. Dans chaque caisson métallique, une projection vidéo permet de suivre en direct ce qui est joué dans l’autre espace scénique. Ce choix représentationnel se révèle riche en possibilités. Seul regret : si la vidéo permet de relayer l’image d’un container à l’autre, le son de la voix lui, ne l’est pas, et l’on souffre un peu de ce manque. Mais comme le précise la compagnie Ktha : « Je suis une personne est construit autour de l’impossibilité de parler à tout le monde en même temps. » Tendons donc l’oreille !


> Est-ce que le monde sait qu’il me parle ?, compagnie Ktha, le 11 mai avec le Théâtre Le Passage, Fécamp, les 16 et 16 mai avec Le Rayon vert à Saint Valéry-en-Caux, les 18 et 19 mai avec Le Rayon vert à Cany-Barville.
Je suis une personne, compagnie Ktha, du 22 mai au 16 juin, au Théâtre Le Monfort, Paris 15e.

 
Crédits :
Une : Je suis une personne, compagnie Ktha, © D. R.
Article : Est-ce que le monde sait qu'il me parle ?, compagnie Ktha, © D. R.
 

 

 

 

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